vendredi 30 mars 2018

Au Front,une de Pardoux dix de retrouvées


Saint-Front, le 23 mars 2018

A 20 heures, à la mairie, Conseil municipal à Saint-Front-la-Rivière
Un seul point à l’ordre du jour : Réflexion commune nouvelle.

« Réflexion commune nouvelle » en langage courant cela voulait dire, étude du projet de regroupement avec la Commune voisine de Saint Pardoux.
Et en plus moderne et dynamique, la fusion avec Saint Pardoux.

Conseil municipal certes, mais un peu spécial puisque seuls les conseillers étaient censés être prévenus, et donc présents.
C’est une déclinaison locale de l'Article L. 2121-18 alinéa 2 du CGCT, puisque déjà rencontrée dans d’autres communes du secteur, le « Conseil municipal à huis-clos ».

Séance à huis clos. Article L. 2121-18 alinéa 2 du CGCT : « Néanmoins, sur la demande de trois membres ou du maire, le conseil municipal peut décider, sans débat, à la majorité absolue des membres présents ou représentés, qu'il se réunit à huis clos. »

La demande de huis clos (initiative) doit donc émaner du maire ou de trois conseillers municipaux au moins. Aucun formalisme n’est imposé pour cette demande mais ce préalable indispensable est sanctionné par la nullité de la délibération prise en huis clos (CE 16 juin 1978, M. Robert X., n°05197).
Le conseil municipal doit également impérativement se prononcer par un vote public sur le huis clos, et le maire ne peut donc pas décréter le huis clos seul (CE 4 mars 1994, Regoin, n°91179). La preuve de cette décision peut être faite par tous moyens (TA Limoges, 8 juin 1989, Chauvat). Cette décision constitue un acte préparatoire de la délibération qui va être prise, et en tant que tel, est inattaquable directement en excès de pouvoir (REP) (TA Nancy, 24 mai 2011, Mme Damienne Villaume, n°1100479).

La chronologie à suivre est la suivante :

    le conseil municipal doit commencer à siéger en audience publique,
    prendre la décision de siéger à huis clos (soit au tout début du conseil, soit en cours de séance),
    puis se réunir à huis clos.


D’autres communes pratiquent aussi « le Conseil municipal à audience publique mais à contenance limitée ».
Il suffit de convoquer, y compris par affichage et voie de presse, mais en choisissant une salle dont la capacité est plafonnée par la commission de sécurité.
Plafonnée au nombre de conseillers, plus quelques places pour les amis.

Parfois aussi seuls les conseillers ont une chaise, le public étant invité à rester debout.

Donc beaucoup d’imagination développée pour favoriser la démocratie participative.
Nous pouvons vous communiquer les bonnes adresses.

Au cas présent, seuls les conseillers ayant été convoqués, la présence de plusieurs habitants ou curieux, fut une surprise non feinte pour le Maire qui, depuis fort longtemps, n’avait pas eu le plaisir de voir des citoyens s’intéresser de si près aux affaires communales. Il conserva son flegme et très affable alla chercher des chaises supplémentaires.

L’accueil ne fût toutefois pas des plus chaleureux mais, après quelques échanges virils, mais corrects, tout rentra dans l’ordre et chacun, élu ou spectateur, tint très convenablement son rôle.

Le match, pardon le conseil, commença prudemment.
En effet, le maire conscient de l’enjeu sans doute, préféra s’accorder une petite séance d’échauffement en relisant très consciencieusement le compte rendu du précédent conseil.
Puis l’on entra dans le vif (encore à cet instant) du sujet.

C’était la troisième réunion des participants sur ce thème et aujourd’hui il fallait trancher car le temps pressait : pour tirer un bénéfice financier de l’opération, toujours en point de mire et très souvent seule motivation de toute discussion « politique », il fallait que l’opération soit réalisée avant la fin de la présente année. Et en fait que le dossier soit monté avant fin juin.
Et Saint-Pardoux, la veille au soir, qui s’est décidé pour la fusion, à l’unanimité. Et qui, maintenant pressée, pousse.

Chacun se rappelant alors que le projet trainait depuis au moins deux ans. Mais l’incitateur, la commune de Saint Pardoux (1 235 habitants) avait jusque-là été peu incitative et l’incitée, la commune de Saint Front (515 habitants) ne s’était pas trop précipitée dans les bras de ses souverains et versatiles voisins. De peur peut-être aussi d’être étouffée par les ambitions des nombreuses et nombreux candidats à la haute fonction communale regroupée. Car constant rappel, début 2019, il ne restera plus que deux années de mandat, juste assez pour préparer … les listes des prochaines élections.
Et ce qui est possible encore aujourd’hui chez nous, ne le sera plus demain avec eux !

Le maire, encore manageur à ce moment, commença donc à dérouler le planning : réunion des deux conseils, réunions publiques, « votations » …
D’abord les choses « faciles », regroupement ou non des associations, du comité des fêtes, le partage des salles, …, puis un peu moins, avec le problème des sociétés de chasse.
Les délégués de ComCom ? Pas de changement.

A ce  train-là tout allait être bouclé dans l’heure et l’un des « observateurs » avait déjà chaussé ses crampons pour aller voir le match France-Colombie, dossier semble-t-il important, et lui aussi, à l’issue connue au demeurant.

Puis vint le problème des conséquences de la fusion sur les finances communales et des équilibres budgétaires et, pour Saint Front, l’augmentation inéluctable des taxes communales, déjà évaluée à environ 16 %.  Comme par enchantement, les langues se délient et les interrogations fusent.
Et dans la foulée, finalement quels sont les avantages de cette fusion ? Pour la commune ? Pour les citoyens ?
Peut-être aurions-nous dû commencer par nous rapprocher d’abord d’une commune de même importance, à fiscalité proche, pour présenter un projet déjà consistant et négocier un nouvel élargissement plus équitable.
Mais avec qui ?

A ce moment précis, l’atmosphère commençait à se détendre et  une certaine dissipation des conseillers devint perceptible.
Chacun imagina, parfois à voix haute, quel aurait pu être ce premier bourdon de l’envolée nuptiale.
Des noms furent prononcés mais le brouhaha régnant ne nous a pas permis de distinguer qui auraient pu être les heureux prétendants, ni qui avaient été les éconduits déçus.
Parmi ces derniers ceux, trop endettés, ou exclusivement attirés par la bonne affaire financière, et parfois les deux, furent complaisamment moqués ce qui mit en joie cette docte assemblée jusqu’alors fort contenue.
Paternel et bienveillant, le maire, enfila sa tenue d’arbitre et siffla la mi-temps.


Mi-temps, on changea de camp, le maire devint animateur.
Et donna la parole à chacun des conseillers se contentant d’apporter des éléments complémentaires, aux questionnements ou points de vue, émis par les uns et les autres.
Par exemple, dans le désordre, la commune nouvelle aura-t-elle plus de poids ? Non mais une perte d’identité évidente. L’Etat imposera-t-il les regroupements comme pour les ComCom ?
A priori non avec ce nouveau gouvernement qui a besoin de se « ruraliser ».
Beaucoup de communes ayant accepté le regrettent désormais. Mais c’est surtout le cas dans les zones urbaines.
Avons-nous vraiment envie de travailler avec Saint Pardoux, d’être sous la tutelle de Saint Pardoux ?
Nous manquons manifestement de beaucoup d’informations.
Et les délais sont trop courts.

La réunion, avec l’apport de chacun, devint progressivement constructive, non pas d’un projet, mais d’une prise de conscience et d’une décision collective.
Chacun s’enrichissant des réflexions des autres.


Le maire reprenant son rôle de premier magistrat propose un vote à bulletin secret, à souligner, car d’usage assez rare dans nos contrées.

Résultat :
-          Pour la fusion 1 voix
-          Contre 11 voix

Et la Colombie bat la France 3 – 2, contre toute attente également.

Conclusion provisoire :

Très rafraîchissante cette séance de conseil municipal.
Des conseillers qui s’expriment, un maire qui anime, une position qui s’affine et se structure au gré des interventions.
Et ceci malgré la pression de l’urgence, de l’urgence devenue courante, permanente, réduisant la réflexion à une perte de temps, à une perte d’argent, car le temps : c’est de l’argent !
Comme disent ceux qui en ont : du temps et de l’argent.
Et bien non, le temps ce n’est pas de l’argent, c’est beaucoup plus précieux que l’argent.
Alors continuez, imposez le temps de la réflexion.

Réflexion personnelle :

Un regroupement de communes ce n’est pas un montage administratico-financier où chaque élu défend son pré-carré et son petit héritage.
Ce doit être d’abord un projet de citoyens qui choisissent de supprimer des frontières artificielles et de se regrouper pour faire des choses plus consistantes et ambitieuses en mutualisant leurs moyens mais surtout en additionnant leurs envies, leurs compétences, leurs disponibilités, leur enthousiasme et qui prennent conscience de leur capacité à constituer une société plus solidaire et plus mature.

Un regroupement de communes c’est une opération importante, un bouleversement, un lourd travail de rapprochement et d’échange.
Pas seulement entre les élus, mais d’abord et surtout entre les habitants.
C’est une occasion pour les élus de changer d’échelle et de sortir des murs de leur cuisine.
Et c’est une opportunité pour les citoyens de se mêler de ce qui les regarde, de monter d’un cran, de rappeler aux élus qu’ils n’ont qu’un bulletin de vote de différence.
C’est pas épais un bulletin de vote. 

Et pourtant, le regroupement Saint Pardoux / Saint Front est déjà une évidence géographique : un rajout de trois maisons de chaque côté et les deux communes se rejoignent.
Economiquement c’est une même entité.
L’agrégation de Milhac et de Sceau Saint Angel constitue un réel bassin de vie.
L’occasion était belle, trop belle sans doute.

Il faudra s’en souvenir !

JC FRASNETTI – Chantres . Milhac de Nontron
Francis LE GOYET – Saint Front la Rivière