lundi 3 juin 2019

Return to Sender

Mais en ce temps-là déjà autrefois
Commençait à s'appeler
Tout de suite aujourd'hui
Bientôt les hommes
Allèrent si vite nulle part
Qu'ils étaient tout le temps
N'importe où
Avec de grandes ferrailles bizarres
Qui partout abîmaient tout


Jacques Prévert, extrait de L'espoir vert

Return to Sender     
(Commentaire subjectif de la lettre Abo Wind)

Le 28 mars 2019 la société ABO WIND écrivait au Président et aux élus du Parc en réponse à la lettre … des hébergeurs, qui ne lui était pas destinée. Façon curieuse mais habituelle de ne pas répondre directement à l’envoyeur, qui est méprisé et ignoré, mais surtout de ne pas répondre aux légitimes et récurrentes questions que son courrier et ses analyses soulèvent.

Et puis tenir la plume des élus, les promoteurs savent faire et les élus aiment bien. Histoire de rappeler qu’ils ne sont pas « porteurs du projet ».
Le courrier commence comme cela :
« La société ABO WIND spécialisée depuis plus de 15 ans dans le développement, la construction et l’exploitation de projets d’énergies renouvelables notamment d’origine éolienne souhaite, par la présente, répondre à la lettre ouverte des 33 hébergeurs du tourisme adressée le 27 février dernier aux élus du Parc Naturel Régional du Périgord Limousin. Nous portons des projets d’énergies renouvelables concertés sur votre territoire afin de répondre aux besoins, enjeux énergétiques et climatiques. »

Dans cette dernière phrase tout est dit : nous portons des projets, incidemment sur votre territoire, afin de répondre aux besoins et enjeux. Et tout ceci est concerté, donc légitime.

Circulez, le reste n’est que littérature !

Et tout le reste est à l’avenant :

Notre entreprise est très attachée au dialogue durant toutes les étapes du projet et nous nous faisons accompagner par les experts pour des réunions dédiées comme celle du 13 février 2019 (Audition du porteur de projet où, par « inadvertance » il n’y eut que très peu de présents) devant le Comité scientifique et du Conseil d’Orientation et de développement du PNRPL.


Et se termine comme ceci : (c’est la partie variable, « touristique », du courrier type)

La création d’un Parc Naturel Régional est une opportunité pour le territoire car il permet l’alliance entre le respect de l’environnement et la poursuite du développement économique.

L’article L.333-1 code de l’environnement) rappelle :

I. – […] Les parcs naturels régionaux concourent à la politique de protection de l'environnement, d'aménagement du territoire, de développement économique et social et d'éducation et de formation du public. A cette fin, ils ont vocation à être des territoires d'expérimentation locale pour l'innovation au service du développement durable des territoires ruraux. […]


Fin 2018, le nombre d’éoliennes installées sur le territoire français était d’environ 8 000. Cette plantation industrielle, initiée il y a 20 ans, peut difficilement continuer d’être qualifiée « d’expérimentation locale » pour l’innovation, et certainement pas « au service » du développement durable de nos territoires ruraux.
En revanche, un territoire comme le Périgord, ne comprenant aucun aérogénérateur, serait une « expérimentation locale » particulièrement remarquable et appréciée. Après le succès du « Zéro phyto », garantissons le « Zéro éoliennes » à nos visiteurs.


« Pour preuve le Parc Naturel du Haut Languedoc a édité une carte touristique de toutes les installations d’énergies renouvelables sur son territoire et fait un bilan énergétique régulier des moyens de production au regard de la consommation globale d’énergie. (L’éolien représente 34 % des productions ENR du Parc, avec 50 % pour l’hydraulique et 15 % pour le bois-énergie – car il n’y a que 136 éoliennes).

ABO Wind dispose d’une longue expérience du développement de parc éolien également dans le PNR du Livradois-Forez.
La fréquentation touristique de ces vastes espaces naturels n’a pas baissé, bien au contraire puisque les établissements affichent leur soutien à la transition énergétique et au valeur (avec les fautes de frappe) du développement durable ce qui est une préoccupation croissante pour les français comme en témoigne le récent sondage sur leur perception de l’éolien : 3 français sur 4 ont une bonne image de l’éolien y compris ceux qui vivent à côté d’un parc. (Phrase alambiquée, style ADEME, opportunément ajoutée au discours lénifiant habituel).

Le futur parc éolien de la Queue d’Ane répond aux enjeux énergétiques du territoire et à ses objectifs de transition énergétique. Il est compatible avec la politique de développement durable du Parc et sa Charte. Il représente une opportunité pour défendre une vision engagée vis à vis des enjeux climatiques d’aujourd’hui et de demain.


Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les élus, nous vous prions de croire en l’assurance de nos sincères salutations ».
Mais alors, effectivement tout est joué, puisque c’est dans la CHARTE.

Et puisque c’est dans la Charte ce n’est plus un avis qui est demandé au PNR-PL, c’est un aveu : Le PNR-PL a rêvé des éoliennes et ABO WIND l’a fait !

Ce que dit ABO WIND : Le PNR – PL, dans sa Charte, s’engage à développer les énergies renouvelables dont l’éolien et à accompagner les collectivités et les porteurs de projets dans leurs démarches (axe n°4 : lutter contre le réchauffement climatique, mesure n°33 : développer la production d’électricité renouvelable).

Ce que dit la Charte :
ORIENTATION 11 - Développer les énergies renouvelables


Choix de cette orientation

En complément des mesures de réduction des consommations d'énergie, l'utilisation d'énergie renouvelable pour assurer le chauffage et la production d'eau chaude sanitaire ou la production d'électricité permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre induites par les activités du territoire.

Sauf que la production de substitution ou supplémentaire d’électricité, même d’origine éolienne, n’aura aucune incidence sur les émissions de gaz à effet de serre du territoire.
Et elle a, en prime, toutes les chances d’être exportée à l’extérieur du territoire.
Cette abusive mise en facteur permet ainsi de légitimer en douceur la production d’électricité.
Et ensuite pour finir de noyer le poisson (et, nous verrons plus loin, en même temps le sauver) il suffit de séparer les deux mesures :


37 • Développer l'utilisation d'énergies renouvelables pour le chauffage et la production d'eau chaude sanitaire

38 • Développer la production d'électricité renouvelable


(C’est donc la mesure 38, la dernière, et non pas la 33 comme le note ABO WIND dans sa précipitation à répondre)

Le potentiel du territoire permet d'envisager un fort développement de la production d'électricité renouvelable en s’appuyant sur plusieurs formes d’énergies :

• par le développement de parcs de grand éolien : suite au schéma régional éolien limousin, 3 Communautés de communes ont décidé de créer sur leur territoire des Zones de Développement Eolien, destinées à accueillir des parcs éoliens. La partie Dordogne du Parc présente également des zones favorables, bien que nettement plus limitées. A terme, ce potentiel devrait permettre d'accueillir au moins 3 parcs éoliens,

• par le développement d'installations photovoltaïques de petites puissances, sur les habitations individuelles, sur les bâtiments publics, sur les exploitations agricoles ou les bâtiments industriels.
Le potentiel solaire du territoire est intéressant, toutes les toitures sud étant potentiellement concernées,
(C’était à un moment où suite à la suppression des aides le solaire n’avait plus la cote et les grands parkings à panneaux n’étaient pas encore à la mode – rappelons que le taux de charge du photovoltaïque ne dépasse pas  15 %, … il faut donc beaucoup d’espace).
• par la création d'unités de méthanisation agricoles.

(Et pour faire place nette il suffit d’éliminer l’hydroélectricité)
La production hydroélectrique n’a pas vocation à être développée en milieux naturels par prélèvement direct sur les cours d’eau du territoire du Parc, car elle est en contradiction avec l’objectif d’effacement des seuils existants pour la reconquête de la qualité de l’eau et des cours d’eau. Toute nouvelle construction de barrage ou de seuil est exclue. Dans certains cas très particuliers, où le potentiel énergétique le justifie, une remise à niveau d’installations existantes pourra être envisagée, sous réserve de compatibilité avec les objectifs de la Directive Cadre sur l’Eau et à la condition d’intégrer l’obligation de préserver ou de rétablir les possibilités de franchissement des ouvrages par les poissons.


Grand éolien, petit photovoltaïque et hydroélectricité sont dans un bateau.
(La méthanisation ne prend pas le même bateau, domaine agricole protégé)
Petit photovoltaïque et hydroélectricité tombent à l’eau.
Qu’est ce qui reste ?


Grand éolien, oh ! Pas beaucoup, au moins trois parcs quand même. Et à la date d’actualisation de la Charte, les parcs c’était plutôt 10 à 15 mâts. Les oppositions n’étaient pas encore aussi structurées et les retours d’expérience trop frais et moins diffusés. Aujourd’hui l’ignorance n’est plus permise.

Et le grand éolien, ce sont des grands aérogénérateurs, 200 m, et c’est beaucoup de parcs avec beaucoup de mâts. Ce sont aussi des infrastructures nouvelles importantes et, pour en absorber le coût, il faut multiplier les mâts, « densifier » comme ils disent. Donc cela commence par 4 éoliennes puis se termine avec 136 comme dans le Haut –Languedoc.

Et tout cela à cause du PNR-PL et sa Charte bricolée opportunément.
Par qui ? Pour qui ?

Le PNR-PL, avec ou sans Charte, a certes une part essentielle et certainement inspiratrice dans l’arrivée du loup dans les bergeries républicaines, mais il n’est pas seul.

Les bergers aussi volontaires et inconséquents que cupides et naïfs, ces quelques maires qui se sont fourvoyés dans cette aventure, seuls, avec le blanc-seing de leur féal conseil en tenant dans l’ignorance leurs administrés, mais aussi les maires et habitants des communes voisines, ont une responsabilité pleine et entière dans la situation dramatique que beaucoup découvrent , ou n’admettent qu’aujourd’hui.

Et ces « maires-porteurs » sont aussi, pour certains, comme par hasard, des décideurs du PNR-PL. Des décideurs influents et qui n’hésitent jamais à influer.
Quelle sera donc la légitimité de l’avis qui pourrait être adopté par l’entité PNR-PL ?


Mais les « maires-voisins » ont, eux aussi, leur part dans la situation que nous connaissons aujourd’hui, car depuis plusieurs années ils ont, eux aussi, été démarchés par les colporteurs.

Discrètement, en petit comité, en prenant bien garde que cet entretien ne s’ébruite et surtout que les élus voisins n’en soient informés. Il y a bien eu quelques fuites, mais aussi beaucoup de mensonges et  beaucoup de surprises. Et depuis plusieurs années, aussi, ils ont été informés des réalités de l’éolien industriel, des conséquences sociétales, environnementales, économiques dans les territoires tels que les nôtres où son implantation n’est ni souhaitable, ni souhaitée. Et qu’ont-ils fait ? RIEN.

Pourquoi vouloir à toute fin installer un aérogénérateur dans un espace insuffisamment venté et traversé par un très important couloir de migration ?
En sachant  pertinemment que cet aérogénérateur n’aurait de sens, en supposant qu’il puisse en avoir, autre qu’expiatoire, que s’il était accompagné de plusieurs dizaines d’autres.


Il est peut-être encore temps, mais plus pour longtemps, de se poser la question !
Jean-Claude Frasnetti. Chantres- Milhac de Nontron